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Jacques Decour, « Quand vous voudrez de mes nouvelles… »

Jacques Decour, « Quand vous voudrez de mes nouvelles… »

L’étude de la vie d’un héros, l’examen des raisons pour lesquelles il décide de rompre, de sortir de la route que suivent les conformistes, comportent toujours des enseignements, une mise en alerte, une exhortation (quelles que soient leurs formes, quel que soit le temps nécessaire pour qu’ils agissent). C’est sans doute cette conviction que partage E. Bluteau, auteur d’un beau dossier consacré à Jacques Decour (1910-1942), l’ami de Paulhan. La brochure contient une chronologie, une bibliographie, un choix de textes importants, reflétant la diversité de ses engagements : militantisme exigeant, enseignement innovant, promotion d’une culture pour tous (mais dégagée de tout dogmatisme), critique littéraire, amour de la culture allemande (Goethe, Heine, Thomas Mann) et refus sans concession du nazisme, dénonciation de la collaboration littéraire… Elle fait appel à des anciens élèves, le poète Rouben Mélik ou Jean-Louis d’Hourselles, aux côtés de ses compagnons de résistance plus connus.

Il est difficile de rendre compte de la richesse de cet ouvrage en quelques lignes, sans en reproduire la table des matières. De façon arbitraire, je retiendrai en particulier le poème qui a donné son titre au dossier, « Quand vous voudrez de mes nouvelles… », les souvenirs de Philisterburg, la petite ville allemande où le jeune lecteur Decourdemanche a découvert le nazisme à l’œuvre parmi les élèves et le personnel du lycée, un article intitulé « Cinéma et collaboration » (malheureusement non daté, paru dans La Pensée libre, que fonda Decour, après L’Université libre et avant Les Lettres françaises), les hommages de Paulhan et de Vercors.

Quand vous voudrez de mes nouvelles illustre aussi, comme en passant, avec la discrétion qui caractérise l’ouvrage, pourtant très précis, l’importance des liens et de l’héritage familiaux dans la construction d’un honneur ; à travers le message liminaire de la fille de l’écrivain (« obligée à une certaine rigueur morale », p. 3), la dernière lettre qu’il écrit à ses parents (« Vous n’avez pas à rougir de moi », pp. 60-61), se rappelle à nous, la belle remarque de Pierre Laborie : il faut toujours s’interroger sur le « modèle de société et les lieux de vie qui ont servi de référence » à ceux qui choisissent de préférer l’image d’une France majoritairement passive et collaborationniste (Le Chagrin et le Venin, Bayard, 2011, p. 330).

Allusion à J. Guéhenno à propos de la fondation du CNE, chez Jean Blanzat, en décembre 1941, avec Decour, Debû-Bridel, Vildrac, Vaudal, p. 56.

  • Jacques Decour, Quand vous voudrez de mes nouvelles…, Collection Histoire, édition établie par Emmanuel Bluteau, La Thébaïde, 2017 27 décembre 2017


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